Il s’agit de répondre à un triple impératif : ↓ coûts, ↓délais et ↑ qualité pour apporter davantage de valeur au client dans un environnement devenu plus ouvert et plus incertain, avec des innovations technologiques qui le permettent (TIC par ex.), et mieux satisfaire les autres parties prenantes, notamment les salariés et surtout les actionnaires. C’est pourquoi les trente dernières années ont été marquées par l’émergence de nouvelles formes d’organisation plus flexibles, plus réactives (structures).

Opérer un changement structurel, c’est à dire sur une modification significative de la structure de l’entreprise, est souvent une nécessité mais il est difficile à conduire de par les nombreuses résistances au changement. Le changement de structure se produit souvent dans un contexte de crise.

 Les structures flexibles

L’organisation par processus 

Définition et caractéristiques 

Un processus a pour caractéristique de concerner plusieurs fonctions (exemple : processus d’achat, gestion de la paye). 

Définition : Une organisation par processus conduit à structurer l’entreprise autour des processus mis en œuvre dans l’entreprise, c’est à dire autour d’un ensemble d’activités relevant de fonctions différentes mais reliées entre elles. 

Caractéristique : L’organisation par processus présente donc la caractéristique d’être transversale et définie en opposition avec une vision verticale et cloisonnée des activités de l’entreprise. Elle ne s’inscrit donc pas dans une logique de fonction ou de métier mais dans une logique de client. Au contraire, les fonctions sont au service de la bonne gestion des processus. 

La méthodologie : le reengineering  selon HAMMER et CHAMPY 

Le reengineering c’est la reconfiguration des processus. 

Elle suppose d’abord l’observation critique de la situation antérieure. 

Puis la remise à plat de l’organisation (↓nombre des opérations nécessaires, centralisation des informations là où la décision doit être prise et partage de ces informations grâce à des bases de données relationnelles, affectation de tout le processus à une seule personne polyvalente).

Les enjeux d’une organisation par processus 

Selon HAMMER et CHAMPY (fiche auteur : Hammer et Champy, les « pères du reengineering »), c’est « une remise en cause fondamentale et une redéfinition radicale des processus opérationnels pour obtenir des gains spectaculaires en matière de coûts, de qualité, de service et de rapidité. » 

Une telle organisation présente des avantages indéniables :

Elle permet ainsi une réduction des coûts, un gain de temps (gains de productivité), une plus grande qualité des biens et services. Elle favorise aussi la flexibilité de l’entreprise qui, grâce à une organisation transversale sous forme de processus, peut répondre efficacement aux besoins d’innovation de plus en plus complexes, aux attentes des clients et à l’instabilité de l’environnement. Les coûts de la coordination des différentes activités réalisées par les divers services se trouvent par ailleurs très fortement réduits. 

Mais elle n’est pas sans risques : 

L’organisation par processus engendre aussi des difficultés. La reconfiguration des processus préalable à sa mise en place conduit souvent à des réductions d’effectifs dans l’entreprise. Elle suppose aussi une nouvelle organisation du travail qui repose sur la polyvalence des salariés et nécessite une augmentation de leurs qualifications, ce qui peut s’avérer coûteux pour l’entreprise par rapport à une organisation fonctionnelle dans laquelle les salariés sont peu qualifiés et spécialisés dans une tâche donnée. 

Il est donc essentiel que l’entreprise parvienne à compenser les coûts d’une organisation par processus par ses avantages. 

L’organisation par projets 

Définition et caractéristiques 

Définition : Une organisation par projets regroupe, pour une période limitée, des spécialistes différents au sein d’une équipe pluridisciplinaire coordonnée par un responsable de projet. Cette équipe est dissoute en fin de projet. 

Caractéristiques : Des équipes projets regroupant des salariés aux connaissances et aux compétences différentes et complémentaires sont ainsi constituées pour une période de temps donné afin de répondre aux attentes spécifiques d’un client. La transversalité est donc caractéristique d’une organisation par projets. 

Les enjeux d’une organisation par projets 

Effets attendus : Ce type d’organisation transversale permet à l’entreprise qui la met en place d’être flexible face à un environnement complexe et changeant (raccourcissement des cycles de vie des produits, forte concurrence mondiale, etc..). 

Elle favorise les échanges de connaissances entre salariés (et donc un apprentissage collectif) et permet une implication collective des salariés bénéfique pour la réussite des projets. 

Malgré ces avantages, l’organisation par projets se heurte à des limites. Le choix des salariés participant aux projets est difficile pour un responsable de projet et peut être source de rivalités et de conflits dans l’entreprise. Le dépassement des contraintes de temps et de coûts pose aussi problème. Le responsable de projet est dans une position difficile entre la recherche de la satisfaction du client en termes de délais et le besoin de qualité. Elle place aussi les salariés dans des conditions de travail difficiles car ils sont soumis au stress. Enfin, la question de la mémorisation des savoirs et savoir-faire accumulés au cours du projet se pose, dans la mesure où les équipes sont amenées à disparaître à la fin du projet. 

« L’adhocratie » encore nommée « organisation innovatrice » selon Mintzberg : structure appropriée pour faire émerger des innovations 

C’est une forme de structure proche de celle qu’on vient d’étudier, mais en moins formalisée. 

L’organisation innovatrice (adhocratie) a été définie par Mintzberg (voir les principales configurations structurelles).

C’est tout sauf une structure taylorienne, mécaniste, de forme U, ou M. C’est au contraire une structure organique caractérisée par une faible formalisation des procédures, une définition souple des tâches et une décentralisation des décisions. Elle repose sur les connaissances et compétences d’experts regroupés au sein d,’équipes pluridisciplinaires dans lesquelles la coordination se fait plutôt par ajustement mutuel. 

Cette structure flexible permet à l’entreprise de s’adapter à un environnement dynamique et complexe. Cette structure s’avère très efficace pour favoriser l’émergence de projets innovants. C’est la forme de structure qui permet de susciter l’intrapreneuriat.  

L’organisation en réseau

Définition et caractéristiques 

Définition : Une organisation en réseau est caractéristique de l’organisation adoptée par l’entreprise qui a fait le choix stratégique d’externaliser les activités non créatrices de valeur et de les faire réaliser par des entreprises partenaires spécialisées, pour se recentrer sur ses compétences distinctives ou fondamentales, et qui a choisi comme modalité principale de croissance la croissance conjointe.

Caractéristiques : L’entreprise se trouve ainsi insérée dans un ensemble constitué d’autres entreprises juridiquement indépendantes, mais reliées entre elles et auxquelles elle est elle-même liée par des relations de coopération contractuelles organisant le maillage de ressources. L’entreprise placée au centre de ce réseau joue un rôle de maître d’œuvre et de coordonnateur. 

Avec ce recours à l’externalisation et aux partenariats, les frontières de l’entreprise se trouvent finalement redessinées et s’avèrent être plutôt floues. Ce n’est pas l’entreprise qui est performante mais le réseau d’entreprises. 

Les enjeux d’une organisation en réseau 

Conditions de succès : Le partage des informations et la coordination des différentes entités s’avèrent fondamentales dans ce type d’organisation. La confiance mutuelle est un élément important dans le bon fonctionnement du réseau. 

Avantages attendus : ils le sont surtout pour l’entreprise au cœur du réseau. L’organisation en réseau permet à l’entreprise située au cœur du réseau d’être flexible et de bénéficier d’un avantage en termes de temps par rapport à ses concurrentes. Grâce à la décentralisation des décisions vers ses partenaires, elle peut réagir vite, voire anticiper les évolutions du marché et les innovations. De plus, avec le développement des partenariats, l’entreprise peut aussi réaliser des économies en laissant aux membres du réseau les activités faiblement créatrices de valeur et concentrer ses ressources sur celles qui le sont de façon à renforcer ses compétences distinctives. Enfin, elle permet de sélectionner les meilleurs spécialistes à chaque étape de la chaîne de valeur.

Risques et limites : Pourtant, une organisation en réseau engendre des difficultés :

  • Pour l’entreprise cœur de réseau : Sélectionner les partenaires, établir des contrats prend du temps et est coûteux (coûts de transaction). Les différents membres du réseau étant autonomes et juridiquement indépendants, il peut s’avérer difficile pour l’entreprise, située au centre du réseau, de contrôler toutes les activités (exemple des problèmes rencontrés par Nike avec les entreprises asiatiques qui fabriquent ses produits). Certains partenaires peuvent manquer d’implication et adopter un comportement de « passager clandestin ». 
  • Ce type d’organisation en réseau peut générer des rapports de domination préjudiciables aux petites entreprises du réseau. Les contrats peuvent leur avoir été imposés (et non négociés). 
  • Enfin, les décisions d’externalisation prises par l’entreprise au cœur du réseau sont à l’origine de problèmes sociaux car elles donnent généralement lieu à des suppressions d’emplois et]ou à des transferts de personnel aux entreprises partenaires. 

La dynamique structurelle

Chaque entreprise doit faire preuve de capacités d’adaptation, d’où la nécessité de faire évoluer sa structure. C’est ce qu’on appelle « la dynamique structurelle ». Les changements peuvent se rapporter à une décentralisation des centres de décision, la mise en place de projets, la volonté de limiter l’emprise de la hiérarchie, etc. 

Les principaux déterminants à l’origine du changement structurel 

Le changement structurel s’explique par plusieurs facteurs internes comme externes à l’entreprise. (revoir les facteurs de contingence de la structure)

 Facteurs externes à l’entreprise 

La modification de l’environnement de l’entreprise en termes d’ :

  • attentes des clients  
  • évolutions technologiques (nouveaux composants, nouveaux standards)
  • élargissement du marché, notamment du fait de la mondialisation
  • évolution de la concurrence (ex. : entrée de nouveaux concurrents à bas coût ou innovants)
  • développement de technologies de l’information et de la communication, qui facilitent la coordination entre acteurs de l’entreprise et permettent un travail transversal (bases de données relationnelles, logiciels de gestion intégrée, plateformes collaboratives de travail, Intranet et Internet, etc.) 

Facteurs internes à l’entreprise

  •  Une réorientation stratégique : (CHANDLER) pour qui la stratégie induit la structure, comme par exemple passer d’une stratégie de spécialisation à une stratégie de diversification impose souvent d’abandonner la structure fonctionnelle pour une structure divisionnelle.
  • Une structure actuelle peu performante qui n’assure pas une compétitivité suffisante (exemple de la trop forte décentralisation des achats, organisés filiale par filiales, qui s’avère moins efficace qu’une centralisation des achats au niveau de la maison mère, permettant le sourcing) ; qui devient stérile et ne génère plus d’innovations ; qui ne permet pas d’accompagner l’augmentation de la taille de l’entreprise (croissance du chiffre d’affaires et/ou des effectifs). 

L’idéal est d’anticiper et de planifier le changement

Un changement anticipé et planifié est un changement qui est voulu, qui est délibéré. 

Il est mené avec méthode. Il résulte d’une démarche rationnelle suivie par les dirigeants de l’entreprise, démarche qui relève de celle classique de résolution de problèmes (les 3 1ères phases doivent vous faire penser au modèle IMC de SIMON): 

Phase 1 :

diagnostic de la structure actuelle 

Phase 2 :

définition des objectifs du changement de structure 

Phase 3 :

choix de la structure adaptée parmi toutes les possibilités 

Phase 4 :

mise en œuvre de cette nouvelle structure. 

Il faut alors revoir les paramètres de conception de la structure (spécialisation horizontale et verticale du travail ; degré de centralisation du pouvoir de décision, choix des mécanismes de coordination) pour assurer la croissance de l’entreprise et sa compétitivité. 

Avantages d’un changement structurel anticipé et planifié

  • Le changement structurel se faisant de façon rationnelle, on peut supposer qu’il sera efficace, approprié à la nouvelle donne.
  • Le diagnostic préalable permet de repérer les modes d’organisation à conserver on ne modifiera pas nécessairement l’entreprise de fond en comble. 

Limites

  •  processus lent (trop ?)
  • source de stress pour les salariés dans la phase 1. 

Mais le plus souvent. le changement de structure se produit dans un contexte de crise et d’urgence 

L’évolution des structures est en effet génératrice de crises, comme le montre l’ analyse de L. GREINER (fiche auteur : Greiner). 

Selon cet auteur, la croissance de l’entreprise est ponctuée de phases de croissance stables (phases d’évolution) et de périodes qui marquent des changements brutaux (phases de révolution). À chaque période de croissance de l’entreprise correspond donc une crise qui lui est propre. Une fois surmontée grâce à un changement de structure, cette crise amorce une nouvelle phase de croissance. 

Six phases de croissance et cinq moments de crises sont ainsi mis en évidence en fonction de 2 axes : la taille et l’âge de l’entreprise. 

l'évolution et la dynamique des structures

1- Phase de croissance par créativité : durant cette phase, la structure est entrepreneuriale, le dirigeant s’investit totalement dans l’activité de sa petite et jeune entreprise dans laquelle la coordination repose fortement sur la communication informelle (ajustement mutuel). Mais le développement de son activité le conduit à être débordé. Il doit alors faire face à une crise de direction (appelée aussi crise de leadership) qui marque le début d’une nouvelle phase.

2- Phase de croissance par la direction : l’entreprise s’organise alors selon une structure fonctionnelle qui permet à l’entreprise de continuer à croître. Mais le caractère très centralisé et formel de cette structure ralentit la prise de décisions et conduit à une crise d’autonomie qui est surmontée grâce à l’adoption d’une structure divisionnelle.

3- Phase de croissance par délégation (ou par décentralisation) : cette structure divisionnelle permet de répondre aux problèmes soulevés par la crise d’autonomie. L’entreprise peut alors poursuivre sa croissance, mais la décentralisation conduit à une dilution du pouvoir et à une perte de contrôle par la direction (excès de différenciation selon Lawrence et Lorsch). Survient alors la crise de contrôle dont l’entreprise ne peut se sortir que par plus de coordination (nécessité d’intégration selon Lawrence et Lorsch). 

4- Phase de croissance par coordination : l’entreprise met en place des procédures formelles et renforce la coordination les différentes unités. Bien qu’elle permette de nouveau la croissance de l’entreprise, cette formalisation plutôt poussée va finalement se traduire par des rigidités. L’entreprise devient très grande et complexe à gérer. Elle doit faire face une crise de bureaucratie (ou de « paperasserie »).

5- Phase de croissance par collaboration : pour surmonter la crise de bureaucratie, l’entreprise met en place une approche plus flexible et plus humaine de la structure. Des équipes projets transversales sont constituées et les systèmes formels de contrôle sont allégés pour donner plus de flexibilité à l’entreprise. Mais cette situation génère une crise de saturation psychologique (ou crise du renouveau) dans un groupe de très grande taille, où les salariés subissent pression et stress compte tenu des importantes responsabilités qu’ils doivent assumer.

6- Phase de croissance par externalisation : elle correspond à une phase d’externalisation des activités et de mise en place d’organisation en réseau afin de surmonter la crise de saturation psychologique (firme réseau). 

Il ne faut pas prendre ce modèle au pied de la lettre. Il existe des limites à ce modèle : une même entreprise peut ne pas connaître toutes ces phases au cours de son existence. L’amplitude des crises et leur durée dépendent de chaque entreprise, de chaque secteur. 

Il existe des résistances au changement 

Le changement structurel n’est pas facile à mettre en œuvre. Sa réussite suppose que les résistances au changement soient vaincues. Ces résistances ou freins, qui sont de plusieurs types, renvoient : 

  • aux représentations des dirigeants : 

La façon dont ils se représentent (c’est-à-dire perçoivent et interprètent) les évolutions internes et externes à l’entreprise ont des conséquences sur leurs choix en matière de structure.

  • aux jeux d’acteurs : 

Comme le montre M. CROZIER (fiche auteur : Crozier), le changement structurel induit une modification de la situation des acteurs et suscite des craintes (perte des avantages acquis, remise en cause du pouvoir des acteurs, modification des routines). Le changement constitue une menace susceptible de remettre en cause leur espace de liberté, leur « zone d’incertitude », la poursuite de leurs propres objectifs.

Les acteurs mettent alors en œuvre des stratégies ou « jeux d’ acteurs », c’ est-à-dire des jeux de pouvoir destinés à freiner le changement et à conserver leur marge actuelle de liberté et de pouvoir. L’opposition au changement peut alors être très puissante. 

Ces résistances au changement ne sont pas pathologiques ni anormales, mais si l’on veut créer une dynamique de changement, il faut les surmonter. 

Les étapes de la gestion du changement 

Étant donné l’existence de résistances, un changement structurel ne peut réussir que si des actions sont mises en place, permettant de piloter le changement. Il est impératif d’accepter la négociation avec les salariés et d’obtenir leur coopération afin que se créent de nouveaux jeux de pouvoir. 

  • avant le changement : écoute et rencontre des acteurs clés de l’entreprise, travaux de groupe, négociation avec les parties prenantes pour analyser les freins possibles (peur de ne pas être compétent, perte des habitudes…).
  • à l’annonce du changement : il s’agit d’expliquer le changement : information faite aux acteurs concernés dès que la décision de changement est prise, rencontre et dialogue pour faire accepter le changement.
  • lors de la mise en place effective de la nouvelle structure : actions de formation, soutien individuel par exemple. 

De toute façon, le changement structurel est décidé et mené selon la situation propre à chaque entreprise ; il a donc un caractère contingent. L’ampleur et l’urgence du changement, les structures des entreprises et les styles de direction ne sont pas les mêmes dans toutes les entreprises.