Motivation et implication des salariés

La notion de motivation est une notion complexe à cerner. Parmi les nombreuses définitions de la motivation, nous en retiendrons une très simple : ensemble des motifs et mobiles qui expliquent que l’individu active son énergie interne pour atteindre un but. 

Cette notion doit être distinguée de celui d’implication dans le travail : on est impliqué dans son travail lorsque le travail occupe une grande place dans sa vie par rapport aux autres domaines. On reconnaît l’implication du salarié dans rattachement au travail, l’ identification du salarié à son emploi, à son rôle. Le salarié impliqué attache de l’importance à son travail, sa vie professionnelle occupe une place importante par rapport aux autres domaines de sa vie. 

Les fondements de la motivation 

Au XX siècle, l’industrialisation et la croissance des entreprises poussent les théoriciens de l’organisation à se pencher sur les facteurs permettant d’accroître les performances de l’entreprise. Ils mettent en évidence que la motivation au travail a un effet sur la qualité du travail et sur l’efficacité des salariés. 

Motivation par le salaire : TAYLOR 

Pour Taylor (méthode du taylorisme formalisée en 1911), la motivation des ouvriers dépend uniquement de la rémunération versée. Il met donc en place un salaire au rendement, seul susceptible de stimuler la productivité des salariés. 

Théorie des besoins : MASLOW

Maslow (fiche auteur : Maslow)fait une synthèse des études sur la motivation (dans les années 40-50) sous la forme d’une pyramide à cinq niveaux.

Motivation, implication des salariés et culture d'entreprise

 

Partant des besoins vitaux et physiologiques (salaire minimum, pause favorisant le repos), les individus cherchent à combler des besoins d’une autre nature : besoins de sécurité (sécurité de l’emploi, sécurité des conditions de travail, avantages sociaux satisfaisants), besoins d’appartenance (contexte de travail avec des collègues sympathiques, participation aux décisions), puis besoin d’estime (témoignage de reconnaissance de la part du supérieur) et besoin d’auto-accomplissement (ex. travail créatif comportant des objectifs ambitieux). 

Nous recherchons d’abord, selon Maslow, à satisfaire chaque besoin d’un niveau donné avant de penser aux besoins situés au niveau immédiatement supérieur de la pyramide. Tant qu’un besoin n’est pas satisfait, il est source de motivation. Lorsqu’il l’est, le besoin supérieur devient facteur de motivation. 

Théorie bi-factorielle : HERZBERG 

Dans les années 1960, F. Herzberg (fiche auteur : Hertzberg) cherche à repérer quels sont les facteurs source de satisfaction et ceux qui sont source d’insatisfaction. Il distingue les « facteurs d’hygiène » des « facteurs moteur », seuls capables de motiver les salariés.

Certains facteurs ne créent que de l’insatisfaction s’ils ne sont pas pris en considération, que du mécontentement. Quand ils le sont, ils ne provoquent pas de satisfaction durable. Il les nomme « facteurs d’hygiène » car ils sont à la base de la bonne santé des relations humaines (conditions matérielles de travail, rémunération, sécurité, relations avec la hiérarchie, avec les collègues et subordonnés). Ils « agissent comme l’héroïne » : il en faut de plus en plus pour satisfaire le salarié. Ils agissent peu sur la motivation. 

D’autres facteurs améliorent le niveau de satisfaction. Il les nomme « facteurs moteurs ». Ils ont afférents au contenu du travail (intérêt du travail, responsabilités et autonomie, perspectives de carrière, perspectives de développement personnel). La motivation est stimulée, l’implication se développe, la performance de l’entreprise s’en trouve améliorée. 

La théorie des attentes de VROOM 

En 1964, Victor VROOM (fiche auteur : Vroom) publie la théorie des attentes. La motivation est décrite comme un processus qui conduit l’individu à fournir volontairement des efforts dans son travail. L’effort est donc l’indicateur de la motivation et de la satisfaction au travail et sera fonction des attentes de l’individu. Trois types d’attentes sont distingués : 

  •  Les attentes par rapport aux efforts que l’individu pense être capable d’effectuer (l’expectation). Autrement dit « Ai-je une chance de réussir, puis-je me faire confiance ? ». On l’abrège E. S’il juge que son niveau d’expectation est trop bas, il ne peut pas être motivé. 
  •  Les attentes en matière de récompense (l’instrumentalité) qui est fonction de la probabilité perçue de recevoir telle récompense en accomplissant telle action. On l’abrège I. Autrement dit « mes efforts pour être plus performant vont-ils être utiles, vont-ils être récompensés » ? 
  •  La valence qui représente la valeur que représente telle récompense pour un individu à un moment donné de sa vie. . Autrement dit, est-ce que c’est important ou pas pour moi ? La valence peut être positive ou négative. Une valence négative peut être consécutive au stress induit par le travail, la fatigue qui le suit, les reproches encourus. On l’abrège V.

Les trois attentes forment un système que l’on nomme VIE (valence x instrumentalité x expectation). Ce système fonctionne comme un produit (et non comme une somme), c’est à dire qu’il suffit qu’un des termes soit nul pour que le résultat soit nul.  

Ces trois dimensions vont déterminer conjointement la motivation de chaque individu. Si un seul élément vaut 0, il n’y aura pas de motivation. Ainsi, si un salarié pense qu’il ne peut pas réussir à réaliser la performance attendue (E), alors sa motivation sera nulle. De même s’il pense que la récompense est insuffisante (I). Ou encore si ses objectifs personnels ne coïncident pas avec les efforts fournis (V). 

Comment un manager peut-il utiliser la théorie des attentes pour motiver le personnel ? 

Cette théorie souligne l’importance des récompenses, des incitations. Il faut donc s’assurer que la politique de rémunération est adaptée aux souhaits des salariés. 

Il faut également que le salarié comprenne quel lien il y a entre les efforts qu’il fait et une meilleure rétribution (par exemple, voir son salaire ne s’accroître que par l’ancienneté n’est pas motivant). Egalement, il faudra expliquer clairement comment sera évaluée sa performance (par exemple, accorder des primes « à la tête du client » n’est pas motivant). 

Elle souligne également l’importance de la formation interne, car elle renforce le salarié dans l’idée qu’il peut en faisant des efforts être plus performant. Ce qui est motivant. 

La mise en œuvre d’une politique de RH favorisant la motivation 

Toute la difficulté réside dans le fait qu’il est très difficile de motiver une personne. On peut juste créer des situations stimulantes pour qu’elle se motive (ou se remotive). 

Les leviers de la motivation

Certaines politiques de GRH sont plus motivantes que d’autres, plus incitatives.

  • Motiver par le système de rémunération 

La rémunération est une des bases incontournables d’une politique de ressources humaines qui vise à motiver son personnel. C’est un stimulant financier. Outre un salaire fixe adapté au secteur et à la taille de l’entreprise, la DRH peut mettre en place une partie variable. Celle-ci est calculée sur des résultats individuels ou collectifs et conduit à un système de primes, d’intéressement, de stock-options. Avec le salaire, l’entreprise peut aussi proposer un éventail d’avantages en nature : voiture de fonction, téléphone, bons-cadeaux, etc. Cet autre axe de rémunération est un outil de motivation très utilisé en pratique. 

  •  Motiver en valorisant les ressources humaines 

Essentiels pour stimuler la motivation des salariés, les aspects non financiers sont très divers : formations qualifiantes, promotion de carrière par une mobilité fonctionnelle. (cf. la GPEC) 

  •  Motiver en changeant le travail 

Les excès du taylorisme ont largement démotivé les salariés. On peut se contenter d’élargir les tâches pour varier le travail (exemple : un technicien de surface lavera les sols, les vitres…). On peut aussi ainsi enrichir les tâches, c’est-à-dire associer à une tâche de base des activités complémentaires demandant des compétences et des connaissances d’un niveau plus élevé (ex. un technicien de surface peut choisir ses produits, gérer son stock, choisir la machine de nettoyage, en faire le petit entretien). 

Plus généralement, on peut améliorer les conditions de travail en jouant sur l’étendue des responsabilités, l’autonomie dans le travail, ce qui suppose un changement du style de management (moins autoritaire, plus participatif).

Les limites des actions sur la motivation 

Toutes les politiques de GRH doivent s’établir en fonction de la stratégie poursuivie par l’entreprise, même si elles sont évidemment contraintes par les évolutions de l’environnement et les menaces qui peuvent peser sur l’activité de la firme. 

En période de croissance économique et sur un marché peu concurrentiel, une entreprise est plus libre de développer une politique de motivation en utilisant les outils à sa disposition. La pression sur les coûts n’est pas aussi forte que dans un environnement économique en crise ou en récession et fortement concurrentiel. 

Ces aspects environnementaux vont fortement contribuer à déterminer les moyens à utiliser en matière de GRH ainsi que la marge de manœuvre disponible. Ainsi, la crise actuelle amène des firmes comme le Crédit Suisse à supprimer tout un volet de leur politique de ressources humaines afin de diminuer les coûts de l’entreprise et maintenir la profitabilité. 

Motivation et performance de l’entreprise 

La motivation des salariés ne peut à elle seule assurer la compétitivité de l’entreprise et sa pérennité. Mais elle est indispensable à la performance globale. 

Les managers doivent détecter les facteurs de démotivation, les supprimer et mettre en place les leviers de motivation appropriés. C’est impératif, car davantage de motivation améliore les performances économiques : gains de productivité, prise d’initiative (d’où meilleure réponse au client et une meilleure rentabilité) et améliore les performances sociales (moins d’absentéisme, de turn-over ; meilleur climat social). 

La culture d’entreprise 

Deux entreprises peuvent être présentes sur un même marché (ex. Eurodisney et Parc Astérix) et pourtant être très différentes parce qu’elles n’ont pas la même culture. Des entreprises ont des cultures très fortes, très prégnantes : on peut citer Disneyland, Google, Microsoft . 

La culture d’entreprise est un facteur d’homogénéisation des comportements et d’implication des salariés. Le partage de valeurs peut permettre aux dirigeants d’éviter les conflits ou de faciliter leur résolution en suscitant l’adhésion des salariés à des objectifs communs. La culture d’entreprise peut être source d’avantage concurrentiel et sa prise en compte est indispensable à la réussite d’un processus de changement organisationnel. 

Définition de la culture d’entreprise 

La culture d’entreprise est un élément immatériel de l’identité de l’entreprise. 

Chaque entreprise est composée d’êtres humains, eux-mêmes en lutte, en projet. Ce sont autant d’acteurs qui forment un groupe social. Ce groupe social s’est forgé peu à peu des manières d’être, de faire, de gérer des conflits, ou de résoudre des problèmes qui lui sont propres. Salariés, managers assurant la direction de l’entreprise, actionnaires sont liés par un contrat implicite incluant ce qui :

  • se fait dans l’entreprise
  • est interdit (tabou)
  • à quoi on croit (les valeurs)
  • Comment on résout les problèmes lorsqu’ils surviennent, etc.

Ce contrat tacite représente la culture d’entreprise. C’est en quelque sorte une carte codée, un code que chacun doit déchiffrer, doit formaliser pour pouvoir s’intégrer et évoluer dans l’entreprise ou avec. 

La culture d’entreprise est « un ensemble de références partagées dans l’entreprise, consciemment ou pas, construites tout au long de son histoire en réponse aux problèmes rencontrés » (d’après THEVENET).

Si on se réfère à MINTZBERG (fiche auteur : Mintzberg), la culture de l’entreprise correspond à la composante idéologique de la structure d’une entreprise. 

Composantes de la culture d’entreprise 

Un univers symbolique

  • des rites : actes qui se répètent et qui forgent une communauté, et qui l’organisent : exemple : les pots de départ à la retraite.
  • des façons d’être : vouvoiement ou tutoiement systématique ; habillement décontracté ou costume cravate ; portes toujours ouvertes ou systématiquement fermées.
  • un certain vocabulaire-maison (ex. le GO du Club Med.
  • des tabous : ce sont toutes les attitudes ou comportements interdits : pas d’alcool à table ; on ne parle pas des échecs commerciaux ; ni de sa rémunération…
  • des symboles : des logos (ct le logo de GOOGLE qui évolue en fonction des périodes de l’année), des mascottes…

Une mémoire collective 

  • une histoire, surtout les périodes particulières de la vie de l’entreprise (fusion, nationalisation, privatisation…)
  • des pères fondateurs et leur charisme, ou leur courage ou leur autoritarisme, leur vision. (Steve Jobs, Alain Afflelou, Bill Gates…). Ils deviennent des héros ; au siège de la Société Générale, les photos de tous les anciens dirigeants sont exposées dans une sorte de galerie de portraits.
  • des mythes : ce sont des histoires idéalisées qui font référence aux héros de l’entreprise, à leur histoire. Le mythe rassure, il est facteur de cohésion. Ex : le mythe du modèle social chez IKEA (culture de l’égalité et de la transparence), alors que ce n’est pas du tout le cas (aucune information sur les rémunérations des hauts dirigeants, fichier du personnel illégal). 

Des attitudes partagées

des valeurs fondamentales : ce sont des idéaux auxquels adhèrent les membres de l’entreprise elles leur donnent des repères. Certaines entreprises insistent plus sur le respect du client, d’autres sur la probité, d’autres encore prônent l’individualisme… Le groupe Danone définit quatre valeurs fondamentales sur son site Internet : ouverture, enthousiasme, humanisme et proximité.

des normes de comportement : c’est un ensemble de codes sociaux qui permettent de poser puis résoudre les problèmes de la même façon, sans qu’on ait à se concerter. C’est ce qui constitue le socle de la culture d’entreprise. Ex : dans la gestion des rapports avec d’autres groupes de travail : refaire systématiquement ce qui a été fait ou au contraire attendre tout des autres ; toujours se remettre en cause ou au contraire fuir tout zèle intempestif ; devant un problème, réunir très vite un groupe de réflexion ou au contraire attendre que le problème se résolve tout seul… ; ne recruter que des débutants à qui on va imposer de passer par tous les échelons avant de diriger l’entreprise, ou au contraire ne recruter que des personnes aguerries. 

La culture comme outil de management 

La culture d’entreprise est un des outils du management. C’est un actif stratégique dont l’entreprise peut tirer parti pour atteindre ses objectifs, actif source d’avantages comparatifs. 

La culture d’entreprise peut, comme d’autres aspects de la politique de ressources humaines, contribuer à orienter l’action de l’entreprise vers les objectifs fixés et participer à la mise en œuvre de la stratégie. 

La culture d’entreprise participe à la cohérence des ressources humaines dans l’entreprise en suscitant l’adhésion des salariés. C’est un outil fédérateur : elle permet aux membres de l’entreprise de se reconnaître et de se mobiliser autour des buts collectifs. 

Source d’avantages concurrentiels donc de performance 

Elle est facteur de :

Cohésion car elle : 

  • sert de référence (même culture, donc mêmes valeurs, même passé, mêmes normes de résolution de problèmes).
  • facilite l’intégration des nouveaux salariés.
  • donne du sens à l’action.
  • permet de transcender les divergences d’intérêt des différentes parties prenantes. En effet, dans la théorie du décideur politique, CYERT ET MARCH ont montré que l’entreprise est une coalition d’ individus poursuivant des objectifs différents. Les conflits entre ces coalitions peuvent être résolus par un apprentissage collectif, ce qui permet de limiter les conflits.

Motivation puisque les salariés s’ identifient à l’entreprise et sont donc plus impliqués, plus motivés. 

Action si elle est déclinée dans un projet d’entreprise (charte qui affirme ce qu’est l’entreprise, ce qu’elle veut être et ce qui fonde ses stratégies, ses décisions, ses modes de fonctionnement). 

Vecteur d’identité et d’image pour les clients, les fournisseurs. La communication sur la culture de l’entreprise peut renforcer son image et son attractivité. 

Vecteur de changements organisationnels.

Limites de la culture comme outil de management 

Dans certains cas, une culture forte pourra s’avérer être un frein puissant des changements stratégiques importants. Elle figera l’entreprise dans sa volonté conservatrice du « on a toujours fait comme ça, on ne voit pas pourquoi on ferait autrement ».Ou encore : « nous sommes invincibles, ce sont les autres qui ont tort ». Cela apparaît souvent lors de la privatisation d’entreprises publiques : lors d’évolutions stratégiques importantes comme à la SNCF, passer de la notion de service rendu un usager à celle de client est un changement culturel important et difficile à mettre en œuvre. Dans ce cas, la culture existante peut devenir un obstacle à la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie. 

Des cultures d’entreprise trop fortes peuvent faire échouer une fusion d’entreprise. On assiste alors à de véritables chocs culturels : exemple : la fusion en 1998 entre Daimler Benz et Chrysler. La culture de la firme américaine et celle de la firme allemande n’ont jamais pu se mélanger ! Les firmes ont divorcé en août 2007…