La libéralisation du commerce mondial doit permettre à chaque pays participant aux échanges de profiter de l’ouverture commerciale pour assurer la croissance de son économie. Le fait que certains pays cherchent malgré tout à protéger leur économie a conduit à l’instauration de règles communes pour supprimer les entraves au libre-échange. 

L’OMC a permis la mise en place d’un système commercial multilatéral. Ce système est à la fois ouvert et libéral car il a comme objectif la suppression progressive des restrictions commerciales. Il est, en outre, fondé sur des règles qui organisent le commerce international et les relations commerciales entre les pays. 

La régulation des échanges mondiaux de biens et de services constitue un enjeu mondial

La question se pose de savoir pourquoi il faut réguler le marché mondial des biens et services. 

Il est opportun d’ouvrir les frontières aux échanges internationaux 

Le développement du commerce mondial, permis par le Libre Echange (LE), est pour nombre d’économistes (à la suite de David Ricardo… cf. Ecol) un facteur de croissance économique mondiale. On a effectivement noté une corrélation positive entre libéralisation des échanges à partir de 1947, croissance des échanges internationaux qui en a résulté et croissance mondiale plus ou moins élevée selon les périodes. 

Les gains (effets positifs) attendus par les pays participant aux échanges, sont les suivants:

  • Le LE stimule la concurrence internationale et améliore l’efficacité productive 

–> L’accès à un marché plus vaste engendre des économies d’échelle donc une baisse des prix. 

–> II encourage l‘innovation : les entreprises nationales confrontées à la concurrence internationale vont devoir s’adapter et innover pour rester compétitives. Favoriser l’innovation, c’est favoriser le Progrès Technique, facteur déterminant de la croissance économique. 

–> Grâce à la DIT, les entreprises s’approvisionnent au coût le plus bas compte tenu des avantages comparatifs des nations ; les FMN pratiquent la DIPP. 

  • Il améliore le niveau de vie des ménages … 

–> En raison de la baisse des prix qu’il permet et de la diversité de l’offre qu’il propose.

  • Il favorise le rattrapage des pays en développement (PED) . 

–> Les PED pourront bénéficier d’IDE, et de transferts de technologie utiles à leur industrialisation et donc à leur croissance. Et les PED (notamment les plus pauvres d’entre eux, les PMA) auront accès à de nouveaux marchés. 

  • Il fait converger le prix des facteurs de production vers un prix mondial 

Selon la théorie HOS (fiche auteur : théorie HOS), le facteur abondant (travail ou capital, initialement bon marché) va devenir de plus en plus rare et son prix va augmenter (inversement pour l’autre facteur).

Ainsi, un PED qui s’ouvre aux échanges verra son salaire moyen augmenter ce qui contribue à stimuler la demande mondiale de biens et services, via l’augmentation du pouvoir d’achat (effet constaté hier en Corée du Sud, actuellement en Chine). => La convergence des rémunérations. 

Ainsi, le LE favoriserait la croissance et le développement. Cependant, un pays peut essayer de profiter de l’ouverture des autres pays tout en conservant des mesures destinées à protéger sa propre économie. 

Il est risqué de céder au protectionnisme

  • Le risque de voir certains pays adopter une attitude de « passager clandestin »

Un pays peut individuellement vouloir profiter de l’ouverture des échanges pour augmenter ses exportations et sa part de marché mondiale, tout en continuant à protéger ses producteurs nationaux (restrictions à l’importation) ou en conservant pour lui les denrées rares dont il est doté, telles les terres rares pour la Chine, indispensables pour les produits de TIC (restrictions à l’exportation). Ce faisant, il a un comportement opportuniste. 

Les partenaires de ce pays sont alors perdants et font de même, par mesure de rétorsion. 

  • Le risque est de passer à une situation de protectionnisme généralisé 

En effet, la multiplication de comportements opportunistes non coopératifs oblige chacun à se replier sur soi et conduit à un protectionnisme généralisé qui étouffe toute croissance économique. On peut citer comme ex. celui qu’on a connu dans les années 30, et qui a nourri la « grande dépression » économique. 

  • Rappel : Les principales mesures protectionnistes 

On distingue généralement les barrières tarifaires (essentiellement les taxes douanières imposées à l’entrée des marchandises), des barrières non tarifaires (restrictions quantitatives ou quotas : limitation des quantités importés, normes techniques ou sanitaires…). Un pays peut aussi avoir recours à différentes formes de dumping afin de « doper » les exportations (pratiquer sur un marché étranger un prix inférieur à celui pratiqué sur le marché intérieur, mais aussi dumping monétaire, dumping social…). 

C’est pourquoi il faut réguler le commerce mondial en établissant des règles communes 

Puisque le libre-échange ne s’impose pas de lui-même (il faut que les pays décident de libéraliser leur économie) et qu’il existe un risque sérieux de comportement opportuniste, la solution pour garantir la stabilité des échanges est de se doter de règles. D’où la nécessité d’une coordination internationale de négociations pour fixer les mêmes règles pour tous les participants à l’accord : les droits, les devoirs et les sanctions applicables vont être déterminés conjointement. 

On a vu ainsi se développer le multilatéralisme des échanges : un grand nombre de pays négocient entre eux des concessions commerciales mutuelles (étendues à tous les pays). C’est ce qui a été fait en 1947 à la sortie de la guerre mondiale, celui de créer un libre-échange multilatéral, avec le GATT (General Ageement on Tarifs and Trade) puis l’OMC (Organisation mondiale du commerce). 

Puis un peu plus tard le régionalisme des échanges : quelques pays suppriment entre eux les obstacles aux échanges et s’autorisent une préférence communautaire, et maintiennent une protection vis-à-vis des pays tiers. Ex. UE à 28 (Brexit à partir du 30/03/2019), ALENA à 3, MERCOSUR à 5 (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay et Venezuela ; Bolivie, Chili, Colombie, l’Équateur et Pérou sont membres associés). 

OMC échanges

L’OMC assume la gouvernance mondiale des échanges de biens et services

Dès 1947, 23 pays (dont la France, le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie…) signent le 1er accord du Gatt (General Agreement on Tariffs and Trade) dans la perspective d’organiser et, à terme, de libéraliser les échanges internationaux de manière négociée. Le Gatt a permis de réduire progressivement les mesures protectionnistes par la rencontre périodique d’États membres de plus en plus nombreux. De 23 pays participant aux premières négociations, ce nombre est passé à 123 lors du cycle de l’Uruguay Round (1986-1994) ; puis à 164 aujourd’hui. 

A la fin de l’Uruguay Round (accords de Marrakech, 1994), l’Organisation mondiale du commerce, dite OMC est fondée. Véritable organisation internationale avec un champ élargi de compétences, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) remplace le GATT à compter du 1er janvier 1995. 

L’OMC 

L’Organisation mondiale du commerce (OMC) est une institution réunissant 164 pays membres (suite à l’entrée de l’Afghanistan et du Libéria en 2016), représentant plus de 90 % du commerce mondial. Un des derniers entrés est la Fédération de Russie (Août 2012); l’Algérie n’en fait pas encore partie, ni l’Iran. 

L’OMC assume la gouvernance mondiale des échanges de biens et services, dans le sens à la fois d’une plus grande liberté et d’une plus grande équité du commerce mondial. Sa principale mission est de favoriser autant que possible la bonne marche, la prévisibilité et la liberté des échanges multilatéraux. 

En respectant certains principes l’OMC fait émerger des règles favorisant la liberté des échanges lors de cycles de négociation entre pays membres, ainsi que lors du règlement des litiges commerciaux.

L’OMC respecte différents principes :  

  • le principe de non-discrimination grâce à la clause de la nation la plus favorisée : chaque pays doit étendre à tous les autres pays membres les concessions qu’il a pu faire à l’un d’entre eux. De plus, une fois sur le marché, les produits importés doivent être traités comme les produits nationaux (clause du traitement national).

Ex : la suppression d’un droit de douane sur les importations d’un produit X accordée, par les USA, à la Corée du sud, doit être accordée par les USA à tous les autres pays membres de l’OMC et signataires de l’accord. 

  • le principe de loyauté dans les échanges, avec l’interdiction des subventions aux exportations et du dumping (vente à perte), qui faussent la concurrence et la suppression des restrictions quantitatives, comme les quotas.
  • le principe de stabilité, de prévisibilité et de transparence: Les règles ne doivent pas changer constamment afin d’assurer la confiance. Chaque pays doit informer les autres de toute modification de sa politique commerciale qui pourrait les affecter. Cette information doit être à la disposition de tous (entreprises, ménages, Etats) 
  • le principe d’équité dans les échanges => des dérogations aux règles. Bien que défenseur du libre-échange, l’OMC accepte certaines restrictions aux échanges. 

Pour protéger les pays en difficulté (souvent les pays en développement), l’OMC admet la suspension des règles de LE dans le cas où une branche de production nationale pourrait subir de « graves dommages » du fait des importations (c’est la clause de sauvegarde).

Ex. l’autorisation temporaire donnée à la France de réintroduire des quotas pour protéger temporairement son industrie textile des importations chinoises à la suite de l’adhésion de la Chine à l’OMC en 2001. 

L’OMC autorise aussi les mesures d’exception destinée à protéger la vie ou la santé humaine, animale ou végétale ou pour assurer la sécurité nationale. 

Elle accepte les accords commerciaux régionaux (tels l’UE), à condition de ne pas accroître le niveau de protection à l’égard des autres pays. 

Elle assure également une assistance spécifique aux pays en développement. Par ex. organisation par l’OMC de séminaires de formation à destination des cadres de pays en développement. 

L’OMC est source de droit international régulant le commerce mondial 

L’OMC est le lieu de négociations multilatérales sur les échanges de B&S. 

  • Elle organise des cycles de négociations d’où émergent des sources de droit commerciales internationales: les accords de l’OMC

Ce sont des conventions négociées entre les États, qui vont dans le sens d’une réduction des entraves au libre-échange (baisse des barrières tarifaires et non tarifaires pour stimuler les échanges de biens et de services). Ces accords précisent les droits et les obligations qui s’imposent à tous les pays membres. 

  • Actuellement les pays membres négocient dans le cadre du programme pour le développement de Doha (ou « cycle de Doha ») démarré en 2001. 

Le cycle de Doha a pour objectif d’élargir la libéralisation dans différents domaines : 

–> produits agricoles : les pays du Sud souhaitent obliger les pays du Nord à cesser de protéger leurs producteurs agricoles par des BT (barrières tarifaires) c’est-à-dire des droits de douane et des BNT (barrières non tarifaires) telles que subventions et normes sanitaires très strictes. NB: Engagement à Nairobi en décembre 2015 de supprimer toutes les subventions à l’exportation de produits agricoles

–> produits industriels : les négociations portent sur les droits de douane sur le textile, et sur l’impact de leur production sur l’environnement. 

–> services : les négociations concernent les services financiers, les télécommunications et les ADPICS (Aspects des droits intellectuels qui touchent au commerce, notamment les droits de la propriété industrielle (brevets, marques et les droits d’auteur). 

–> questions de Singapour : on nomme ainsi les thèmes de négociation restés en suspens à la fin du dernier round tels que par ex. les IDE, l’ouverture à la concurrence des marchés publics.

L’OMC permet le règlement des litiges commerciaux entre pays grâce à l’ORD  

En cas de désaccord commercial entre les pays membres (c’est-à-dire lorsqu ‘un pays adopte une mesure commerciale considérée par d’autres pays membres comme une violation des accords de l’OMC), l’OMC a instauré l’Organe de règlement des différends (ORD), qui garantit l’application et le respect des droits de chaque pays. 

Son but est de favoriser le règlement amiable des conflits commerciaux entre pays membres via la consultation d’un groupe d’experts. 

L’ORD met en place la procédure pour résoudre le litige. Sa compétence l’autorise à :

  • constituer un groupe d’experts chargés d’examiner l’affaire
  • adopter ou rejeter ses conclusions
  • surveiller la mise en œuvre des décisions et recommandations
  • autoriser l’adoption de mesures de rétorsion si le pays concerné ne se conforme pas à la décision

En 20 ans de 1995 à 2015, plus de 500 différends ont été portés devant l’OMC et plus de 350 décisions ont été rendues. Plus de 50 % des plaintes se résolvent par un règlement amiable après consultations préliminaires des pays concernés. 

L’ORD est en quelque sorte un tribunal international commercial dont les décisions créent la jurisprudence, permettant d’interpréter les accords signés. 

Résumé : 

Les enjeux d’une organisation du commerce mondial 

 La libéralisation du commerce mondial devrait conduire à des gains mutuels pour chacun des pays participant aux échanges. Les effets attendus de la libéralisation et de l’augmentation du commerce mondial sont positifs: stimulation de la concurrence internationale donc de l’innovation et de la croissance, convergence des rémunérations,  rattrapage des pays les moins avancés. 

Individuellement un pays peut cependant essayer de profiter de l’ouverture des autres pays tout en conservant des mesures destinées à protéger sa propre économie (comportement de passager clandestin). En l’absence d’un processus de régulation des échanges de biens et services sur le marché mondial, des comportements opportunistes peuvent avoir tendance à se développer. 

 Afin d’éviter ces comportements et favoriser la croissance mondiale, une coordination internationale est nécessaire pour fixer les mêmes règles (devoirs, droits, sanctions applicables) à tous les pays. Ainsi, des règles communes ont été instituées dès 1947 (par le GAIT) afin de supprimer progressivement les entraves au libre-échange. Aujourd’hui, une organisation internationale, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) est chargée de cette gouvernance. 

Les principes de fonctionnement de l’Organisation Mondiale du Commerce 

L’OMC assure la gouvernance mondiale des échanges de biens et services en permettant l’émergence de règles, avec pour objectifs affichés une plus grande liberté, mais aussi une plus grande équité du commerce mondial.   

Ces règles sont négociées par les pays membres dans le cadre de cycles (Rounds) qui doivent mener à des accords précisant des droits et obligations qui s’appliquent à tous. Elles sont précisées par la jurisprudence de l’Organe de règlement des différends (ORD) lors du règlement des litiges commerciaux entre pays membres. Cette organisation est donc source d’un droit international qui régit le commerce mondial. 

Ces règles comprennent aussi des règles d’exception comme la clause de la nation la plus favorisée, la clause de sauvegarde, les dérogations qui tiennent compte des particularités des pays. De plus, l’OMC apporte une expertise pour les pays quant à leur politique commerciale et une assistance spécifique pour les pays en développement.