Toute personne accède à une activité professionnelle en devenant salarié, fonctionnaire ou travailleur indépendant.
Chacun de ces trois régimes juridiques ainsi que leurs modalités d’accès sont définis par la loi et les conventions. Au-delà de cette diversité, une certaine perméabilité existe entre les différents statuts.
Le cadre juridique de l’accès à une activité professionnelle
Les principes constitutionnels et communautaires affirment le droit d’accès à une activité professionnelle.
Des principes communautaires et constitutionnels régissent les différents régimes juridiques
Les principes constitutionnels (droit interne)
- Les principes du droit à l’emploi et de la liberté du travail
Le droit à l’emploi est un principe reconnu dans le Préambule de la Constitution de 1946, « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ». Il est le fondement de l’intervention de l’Etat sur le marché du travail en vue du plein-emploi.
La liberté du travail est la faculté reconnue à tout homme de travailler ou non et d’exercer la profession de son choix (énoncé par l’article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 « toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage »)
- Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie
Il est issu de la période révolutionnaire (décret d’Allarde des 2-17 mars 1791), recouvre la liberté d’entreprendre (qui permet de créer librement une activité économique et d’exercer la profession de son choix), la liberté d’exploiter et la liberté de la concurrence.
Les principes communautaires (droit communautaire / européen)
Ces principes sont des libertés fondamentales, dont certaines reprennent celles que l’on vient d’énoncer, mais à une échelle européenne.
- La libre circulation des personnes
C’est l’une des libertés fondamentales garanties par le droit communautaire. Elle implique pour tout citoyen de l’UE le droit de chercher un emploi et le droit de travailler dans n’importe quel État membre sans discrimination de nationalité. Il s’agit sans doute du droit le plus important octroyé aux personnes par la législation communautaire et c’est un élément essentiel de la citoyenneté européenne.
- La liberté d’établissement
Elle comporte le droit d’accès et d’exercice à toute activité indépendante non salariée, qu’elle soit commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, et le droit de créer et gérer une entreprise en vue d’exercer une activité permanente aux mêmes conditions que celles énoncées par le droit de l’État membre d’établissement pour ses propres ressortissants (sauf pour les activités participant à l’exercice de l’autorité publique).
- Le principe d’égalité de traitement
Il vise l’accès à l’emploi, les conditions de travail et tous les autres avantages pouvant contribuer à faciliter l’intégration du travailleur dans l’État membre d’accueil. Le travailleur européen travaillant dans un État membre doit être traité de la même façon que les travailleurs nationaux pour toutes les conditions d’emploi et de travail (licenciement et rémunération notamment).
- La liberté d’entreprise
Elle constitue un principe fondamental de l’économie libérale, sur lequel s’est appuyée la construction communautaire. Elle recouvre la liberté d’exercer une activité économique ou commerciale, et la liberté contractuelle, toutes 2 reconnues par la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE). La liberté de concurrence est aussi inscrite dans les traités.
Le droit d’accès à l’emploi: un principe relatif
- La liberté d’entreprendre et la liberté du travail constituent un même principe, celui de la liberté d’action professionnelle.
La liberté d’entreprendre inscrite dans la Constitution française de 1958 a pour corollaire le principe juridique de la liberté de l’employeur dans le choix de ses collaborateurs. Ainsi, le travailleur est censé choisir librement son emploi, et l’employeur est censé recruter librement ses collaborateurs.
- Les limites à ces principes :
–> Pas de discrimination à l’embauche (voir le régime des salariés)
Cependant, ces principes sont soumis à l’interdiction de la prise en compte de certains critères qui relèveraient de la discrimination à l’embauche, fondée sur des éléments extérieurs au travail : sexe, religion, apparence physique, nationalité, vie privée, etc. La préoccupation autour des risques de discrimination et, plus largement, d’injustice dans l’emploi découle d’un certain nombre de textes fondateurs de l’Etat français, repris sur le plan européen.
Si le choix d’un futur salarié est laissé à la libre appréciation de l’employeur, celui-ci doit néanmoins respecter des règles lors du recrutement, prohibant toute forme de discrimination pour promouvoir l’égalité des chances entre les différents candidats à l’emploi.
–> Un droit au travail tout relatif
S’il est incontestable qu’il existe un droit de travailler, le principe d’un droit au travail est illusoire dans des économies où le législateur se doit de faire son possible pour favoriser l’emploi mais ne peut le garantir pour tous. Le droit d’obtenir un emploi est à concilier avec la liberté d’entreprendre qui permet, par ex., au chef d’entreprise de choisir ses salariés, de recruter ou non.
Le choix d’un régime juridique du travail
Le choix de l’activité entraîne l’application d’un ou plusieurs régimes juridiques encadrés par le législateur, chacun comportant ses spécificités.
L’exercice d’une activité professionnelle implique en effet que l’individu choisisse un régime juridique de travail, en fonction de critères qui lui sont personnels. Certains opteront pour la stabilité de l’emploi, de la rémunération et la protection sociale, tandis que d’autres rechercheront l’indépendance, voire le risque. C’est ainsi que la relation de travail peut s’inscrire soit dans un contexte de subordination juridique à l’égard d’un employeur privé ou public, soit dans un contexte d’ indépendance. Le choix de l’activité entraîne l’application d’un ou plusieurs régimes juridiques encadrés par le législateur, chacun comportant ses spécificités.
Le travail dans un contexte de subordination juridique
La subordination juridique consiste à travailler sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Elle peut s’analyser en référence à l’intérêt de l’entreprise (employeur privé) ou à l’intérêt général (employeur public)
La subordination juridique à l’égard d’un employeur privé
En l’absence de définition légale, la jurisprudence définit le contrat de travail comme une convention par laquelle une personne physique, le salarié, met son activité professionnelle au service d’une autre personne morale ou physique, l’employeur, sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant une rémunération.
Les éléments constitutifs du contrat de travail sont donc, selon la Cour de cassation:
- la réalisation d’une prestation de travail (réalisation d’un travail effectif)
- le versement d’une rémunération
- un lien de subordination juridique, qui en est le critère décisif : travailler pour le compte d’autrui et sous sa direction (lieu de travail imposé et présence obligatoire, horaires imposés, directives auxquelles on ne peut se soustraire, matériel de travail fourni, sanctions disciplinaires etc.).
La subordination juridique permet de qualifier l’existence d’un contrat de travail et d’accorder au travailleur un statut de salarié, un statut avantageux à plusieurs titres (salaire minimum, congés payés, prestations sociales, licenciement soumis à conditions, indemnités en cas de licenciement…)
La subordination juridique à l’égard d’un employeur public
Dans le secteur privé, le lien de subordination lie le salarié à son employeur ; dans la fonction publique, le lien qui unit le fonctionnaire à l’Administration est de nature statutaire et non contractuelle.
En effet, contrairement aux personnels du secteur privé, la situation des fonctionnaires n’est pas régie par un contrat mais par la loi et le règlement qui organisent leur statut.
Ayant pour vocation de remplir une mission de service public, les agents de l’État doivent se conformer aux instructions de leurs supérieurs hiérarchiques (sauf si l’ordre est manifestement illégal). Le devoir d’obéissance impose au fonctionnaire de respecter les lois et règlements de toute nature ; le refus d’obéissance équivaut à une faute professionnelle passible de sanction disciplinaire.
La subordination hiérarchique impose également de témoigner de la déférence aux supérieurs, de se soumettre au contrôle hiérarchique de l’ autorité compétente et d’exercer loyalement ses fonctions.
Le travail dans un contexte d’indépendance
Le travailleur indépendant exerce son activité intellectuelle ou commerciale non pas dans celui d’un contrat de travail mais dans le cadre d’un contrat d’entreprise : alors que le salarié est lié à un employeur, le travailleur indépendant a des clients.
Qu’ils soient artisans, commerçants, agriculteurs, artistes ou en profession libérale, les entrepreneurs individuels fournissent à leurs clients des services rémunérés tout en conservant leur indépendance dans l’exercice de leur activité.
Un travailleur indépendant est à la fois entrepreneur, propriétaire de ses moyens de production et son propre employé. Il est maître des décisions concernant son travail, dans le respect des demandes de sa clientèle.
En l’absence de lien de subordination le travailleur indépendant exerce son activité pour son compte (en poursuivant ses intérêts privés) en assumant les risques.
Des déontologies spécifiques selon l’activité professionnelle
Chaque régime confère des droits et des obligations qui renvoient à une déontologie spécifique en référence à l’intérêt de l’entreprise et/ou à l’intérêt général.
La déontologie est l’ensemble des règles que se donne une profession. Caractéristique de la profession libérale (code de déontologie des professionnels de l’expertise comptable par exemple), elle a aujourd’hui tendance à s’étendre de plus en plus aux autres régimes. Elle concerne désormais les trois régimes juridiques du travail.
Ce véritable droit professionnel illustre la demande de contrôle de la société, qui veut se garantir contre des pratiques peu éthiques et de certaines professions qui ressentent le besoin d’afficher une garantie de qualité. Chartes professionnelles ou d’entreprise et codes de bonne conduite se développent, recevant une qualification juridique différente selon leur mode de conclusion : accord d’entreprise, acte unilatéral de l’employeur…
Pour le fonctionnaire, la déontologie s’exprime dans la réglementation statutaire, le contrôle étant assuré par l’État (ex. : un fonctionnaire doit s’abstenir de prendre un quelconque intérêt dans une entreprise avec laquelle il a été en relation au titre de ses fonctions administratives) afin de servir au mieux l’ intérêt général.
La déontologie permet de contrôler les pratiques des professionnels. Le conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables a notamment pour mission de veiller au respect de la déontologie et des bonnes pratiques par les experts-comptables.