Les représentants des salariés jouent un rôle de premier ordre dans le cadre de l’adaptation de l’entreprise et de ses salariés aux évolutions de l’activité professionnelle. À ce titre, ils disposent de droits spécifiques et d’outils préventifs que sont les accords de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).
Des attributions pour protéger les salariés
Les représentants du personnel sont de deux types :
- représentants élus, que sont les délégués du personnel et les membres salariés du comité d’entreprise
- représentants désignés que sont les délégués syndicaux
La construction du dialogue social
Le dialogue social dans l’organisation regroupe toutes les actions améliorant la communication et la compréhension entre les différents acteurs dont les intérêts peuvent diverger (cf le cours de MDE sur la gouvernance) et nuire à la performance globale.
Il se construit lors d’échanges d’information, des consultations et des négociations.
Des rôles divers selon les représentants
Le rôle des délégués du personnel (DP)
Ils sont élus pour 4 ans parmi les salariés des entreprises où sont employés au moins 11 salariés. Leur nombre, de 1 à 9, dépend du nombre de salariés dans l’entreprise.
Ils veillent à l’application du droit du travail et présentent à l’employeur les réclamations individuelles ou collectives du personnel relatives à l’application du Code du travail dans l’entreprise et aux salaires. Les DP transmettent les réclamations à l’employeur lors d’une réunion mensuelle. Ils peuvent en cas de besoin faire appel à l’inspecteur du travail.
Ils sont aussi consultés sur les conditions de travail et l’emploi dans l’entreprise et peuvent émettre avis et propositions. Dans les entreprises de 50 salariés et plus, ils assurent les fonctions du comité d’entreprise (CE) si celui-ci n’a pu être constitué. Dans les entreprises de moins de 50 salariés, ils peuvent être aussi désignés comme délégués syndicaux.
Les missions du comité d’entreprise (CE)
L’élection pour 4 ans des membres du CE se fait dans les entreprises comptant au moins 50 salariés. Une fois par mois, le CE regroupe l’employeur, qui en est le président, et des salariés élus.
Le CE a une existence juridique propre, il dispose donc de la personnalité juridique. Il gère son propre patrimoine et son personnel. Ses ressources proviennent de l’employeur. Le CE peut employer des salariés et agir en justice.
Il assure une double fonction, économique et sociale.
Rôle économique :
Le CE a un rôle consultatif sur la gestion de l’entreprise :
- Il est consulté sur tout ce qui touche à l’emploi et aux conditions de travail dans l’entreprise (ex. durée du travail, Introduction de nouvelles technologies, qualification, formation, rémunération). L’employeur doit fournir au CE des informations (ex. : rapport d’activité de l’entreprise).
- Il doit être informé et consulté préalablement à tout projet de restructuration ou de mesures risquant de modifier les conditions de travail ou d’emploi dans l’entreprise et affecter le volume et la structure des effectifs de l’entreprise.
L’employeur doit lui fournir tous les documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission.
- Il peut faire des propositions pour améliorer les conditions de vie et de travail dans l’entreprise.
RQ : Une directive européenne de 1996 a mis en place un comité d’entreprise européen, s’ajoutant aux Institutions nationales, pour assurer la représentation des salariés à l’échelle européenne. Sont concernés les entreprises et les groupes comptant au moins 1 000 salariés dans les Etats membres et ayant au moins un établissement d’au moins 150 salariés dans au moins deux de ces Etats.
Le CE peut déclencher une procédure d’alerte auprès du tribunal de commerce, quand il a connaissance de faits préoccupants sur la situation économique de l’entreprise.
Rôle social :
Le CE assure et contrôle la gestion des activités sociales et culturelles instituées dans l’entreprise au bénéfice des salariés et de leur famille (ex. la bibliothèque, des centres de vacances, des clubs sportifs, etc). Il s’agit donc de prestations non obligatoires légalement, fournies aux personnes pour améliorer leurs conditions de vie.
Le rôle des délégués syndicaux (DS)
Tout syndicat légalement constitué depuis deux ans, et qui remplit les critères de respect des valeurs républicaines et d’indépendance, peut créer une section syndicale dans une entreprise ou un établissement de plus de 50 salariés et désigner un délégué syndical parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections professionnelles. (Attention les DS ne sont donc pas élus par le personnel).
Dans les entreprises de moins de 50 salariés, les syndicats peuvent désigner un délégué du personnel, pour la durée de son mandat, comme délégué syndical.
Le délégué syndical représente le syndicat auprès de l’ employeur pour formuler des propositions, des revendications ou des réclamations. Il assure par ailleurs l’interface entre les salariés et l’organisation syndicale à laquelle il appartient. Mais ce qui fait la principale spécificité du DS, c’est sa fonction de négociateur.
La loi du 20 août 2008 sur la démocratie sociale a créé la fonction de représentant de la section syndicale (RSS), dont le rôle est de représenter le syndicat dans l’entreprise en l’absence de délégué syndical au sein de celle-ci.
Le rôle de la délégation unique du personnel, spécificité offerte aux PME
Pour alléger et simplifier la représentation du personnel dans les PME, toute entreprise de 50 à 200 salariés peut mettre en place la délégation unique du personnel (DUP) qui, élue pour deux ans, joue à la fois le rôle des DP et celui du CE. La mise en place d’une DUP tenant lieu de comité d’entreprise et de délégués du personnel est une simple faculté pour l’employeur. Ce dernier a ainsi le choix entre adopter cette possibilité ou conserver les délégués du personnel et le comité d’entreprise de façon distincte.
NB : la loi du 17 août 2015 réformant le dialogue social a élargi la possibilité de regrouper DP, CE mais aussi le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au sein d’une DUP. Elle concerne désormais les entreprises de 50 à 300 salariés.
Cette loi créée (juillet 2017) une représentation externe pour les TPE (moins de 11 salariés) via des « commissions régionales paritaires » (10 représentants syndicaux, 10 patronaux) ayant une mission générale de « conseil » et d’« information ». (cf. doc complémentaire)
Depuis le 1er août 2016 (décret d’application de la loi du 6 août 2015), il existe désormais un nouveau représentant des salariés : le défenseur syndical.
Le défenseur syndical est mandaté par un syndicat pour assister et défendre les salariés qui ont un litige avec leur employeur et qui souhaite le porter devant le conseil de prud’hommes et la cour d’appel. Exemple de litige : salaires non payés, licenciement abusif etc.
Pour en savoir plus sur la représentation du personnel dans l’entreprise
La loi du 8 août 2016 est venue renforcer la facilité de l’exercice du droit syndical en augmentant les crédits d’heures des représentants syndicaux.
Des possibilités d’action sur les évolutions de l’activité professionnelle
Le droit à des moyens matériels
Les représentants du personnel doivent bénéficier de moyens de fonctionnement. Ainsi, le CE dispose d’une subvention de fonctionnement (égale à 0,2 % de la masse salariale) ainsi qu’une contribution de l’entreprise pour les activités sociales et culturelles.
Les représentants du personnel disposent d’une liberté de déplacement dans ou hors de l’entreprise dans le cadre des heures de délégation. Ce crédit d’heures mensuel (dont le nombre varie selon les cas) accordé pour réaliser leurs missions, est considéré comme du temps de travail. Ils bénéficient aussi d’un local aménagé pour exercer leur fonction.
Le droit à l’information et à la consultation
Le CE doit être informé et consulté obligatoirement sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise.
La loi Rebsamen recentre l’ensemble des consultations-informations (actuellement 17 obligations) autour de trois grands rendez-vous annuels :
- les orientations stratégiques de l’entreprise (incluant la GPEC et les « orientations » de la formation professionnelle)
- la situation économique et financière de l’entreprise (incluant la politique de recherche et développement et l’utilisation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi)
- la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi (formation, durée et aménagement du temps de travail, l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes…)
+ Pour les entreprises d’au moins 300 salariés une obligation d’information trimestrielle.
Pour chacune de ces consultations, le CE disposera d’un certain nombre d’informations disponibles sur la base de données économiques et sociales (BDES) et aura la possibilité se faire assister par un expert.
Aussi si l’employeur n’informe pas le CE sur les 3 grands volets cité ci-dessus, il commet le délit d’entrave et encourt une condamnation.
Le problème constaté, pour les chefs d’entreprise, il est effectivement difficile de faire coexister à la fois l’obligation d’information des marchés et celle des salariés.
Le droit d’anticiper et d’accompagner les variations d’effectifs de l’entreprise : les outils préventifs
La gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC)
Pour développer le dialogue social, la loi a institué une obligation triennale de négociation pour tout établissement de 150 personnes ou pour tout groupe au-delà de 300 salariés.
La GPEC est une gestion anticipative et préventive des ressources humaines, en fonction des contraintes de l’environnement et des choix stratégiques de l’entreprise. Elle vise à prévenir en amont les décalages d’effectifs et de compétences, et cherche à éviter les licenciements pour motif économique.
Cette négociation porte obligatoirement sur la mise en place d’un dispositif de GPEC ainsi que les mesures d’accompagnement susceptibles de lui être associées, en particulier de formation, de VAE, de bilan de compétences et d’accompagnement de la mobilité professionnelle et géographique des salariés.
Le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)
A la différence de la GPEC, le PSE a pour vocation de résoudre une situation conjoncturelle difficile que l’entreprise n’a pu anticiper.
Ainsi, l’établissement d’un plan de sauvegarde de l’emploi est obligatoire pour tous les projets de licenciement économique visant 10 salariés ou plus sur une même période de 30 jours, dans les entreprises de 50 salariés et plus.
Ce plan est destiné à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre, et à faciliter le reclassement du personnel dont le licenciement ne pourrait être évité. L’employeur doit dresser un programme avec le comité d’entreprise ou les délégués du personnel, en vue de déterminer les mesures de reclassement, l’échelonnement et l’ordre des licenciements nécessités par la situation économique de l’entreprise ou par des mutations technologiques.
NB : On notera que les PME employant moins de 50 salariés n’ont pas à mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi (elles doivent cependant mettre en œuvre des mesures, notamment de reclassement, pour limiter les licenciements si elles projettent de licencier 10 salariés ou plus).
Ces 2 outils préventifs ne concernent donc que les entreprises d’une certaine taille.
RQ : En raison du rôle qu’il joue dans l’entreprise les RP ont droit à une protection spécifique :
- La protection spéciale contre les licenciements :
Les représentants du personnel bénéficient d’une protection spéciale qui interdit leur licenciement sans autorisation de l’inspecteur du travail (qui vérifie qu’il ne s’agit pas d’une mesure discriminatoire) et après avis du CE. Cette protection dure le temps de leur mandat mais se prolonge ensuite 6 mois après son expiration.
- Le délit d’entrave :
Le fait de porter atteinte ou de tenter de porter atteinte à la nomination ou à l’exercice des fonctions d’un RP constitue un délit d’entrave. Quand le délit est constitué le tribunal correctionnel peut prononcer des peines d’emprisonnement (si obstacle à la constitution : 1 an) et/ou d’amendes (7500€ : obstacle à l’exercice des fonctions ou au fonctionnement régulier de ces IRP) peines modifiées par la loi Macron.