L’ innovation permet aux entreprises de se construire un avantage concurrentiel. De nombreuses entreprises considèrent qu’il est important de conserver la mémoire de l’organisation et d’éviter autant que possible la perte des savoirs et savoir-faire considérés comme un capital inestimable. Elles mettent alors en place un management des connaissances.

La politique d’innovation 

Schumpeter (fiche auteur : Schumpeter)distinguait 5 formes d’innovation (nouveau produit, nouveau process, nouveau débouché, nouvelle matière première, nouvelle organisation du travail). 

Pour ce cours consacré aux innovations technologiques, nous définirons l’innovation comme le processus par lequel une connaissance engendre une création de valeur supplémentaire pour l’entreprise sous forme de bien, de service ou de procédé. La connaissance préalable peut prendre la forme d’une invention c’est-à-dire une réponse technique nouvelle apportée à une situation nouvelle ou à un problème rencontré. L’invention nécessite une protection. C’est la fonction des brevets. 

L’analyse du patrimoine technologique de l’entreprise 

Dans le cadre du management de ses ressources technologiques, l’entreprise fait l’inventaire de son patrimoine technologique, en fait le diagnostic pour en déterminer les forces et les faiblesses, puis cherche à l’optimiser. 

 Définition  

Le patrimoine technologique d’une entreprise est composé de l’ensemble des technologies maîtrisées par cette entreprise, que celles-ci soient effectivement utilisées dans ses activités ou qu’elles soient maintenues en réserve. 

 Le patrimoine technologique comprend trois types de technologies

  • les technologies de bases, largement répandues dans le secteur d’activité, connues et maîtrisées depuis longtemps par l’entreprise mais aussi par ses concurrents. Si elles sont indispensables pour que l’entreprise se maintienne, elles ne donnent pas d’avantage concurrentiel (ex. : technologie des codes-barres). 
  • les technologies clés, dont la maîtrise est essentielle pour la position concurrentielle de l’entreprise. Elles lui permettent des progrès significatifs et offrent des possibilités de différenciation, source de rente monopolistique temporaire (ex. de la société TARTEFRAIS qui a déposé un brevet lui permettant de fabriquer des éclairs au chocolat longue conservation). 
  •  les technologies émergentes, en phase de développement et prometteuses en termes de progrès et d’applications possibles (exemple : technologie des puces en plastique destinées à certaines pellicules d’emballage, en cours de développement chez INFINEON ; technologie des tissus intelligents permettant la reconstitution de la peau détruite par une brûlure). 

On peut donc parler de cycle de vie de la technologie

L’entreprise cherche alors à optimiser son patrimoine mais aussi à l’enrichir pour éviter le phénomène de déclin naturel des technologies qui s’explique par le fait qu’elles ont, comme tout produit, un cycle de vie. Elle doit peu à peu abandonner les technologies de base (qui vont devenir obsolètes) pour investir dans les technologies —clé (qui vont devenir « de base » car elles vont se diffuser) et s’intéresser aux technologies émergentes (futures technologies clé). 

A chacun de ces stades (émergence, croissance, maturité, vieillesse), il faut une stratégie adéquate, ce qui signifie que l’entreprise doit gérer les ruptures entre 2 technologies. 

la politique d'innovation

Les modalités de la politique d’innovation 

La question se pose ici de savoir comment enrichir son patrimoine technologique. 

Plusieurs modalités s’offrent aux entreprises pour manager l’ innovation. Cet enrichissement peut se faire en interne comme en externe. 

L’entreprise peut enrichir son patrimoine technologique en interne en :

  • organisant une veille technologique : l’entreprise met en place des structures et une procédure pour collecter et traiter des informations sur les nouvelles technologies auprès de fournisseurs, clients, concurrents. 
  • favorisant l’intrapreneuriat (cf. chapitre logique entrepreneuriale) : « L’intrapreneuriat est l’ensemble des démarches de management qui visent à instaurer l’esprit d’entreprendre dans une entreprise existante. Un intrapreneur est un salarié qui  transforme une idée en une activité rentable pour l’entreprise. L’intrapreneuriat suppose donc l’adoption de pratiques entrepreneuriales au sein d’entreprises établies, c’est-à-dire de pratiques permettant une plus grande créativité, plus d’innovation et de prise d’initiative.   
  • mettant en oeuvre une démarche qualité : c’est l’ensemble des principes et des méthodes visant à mobiliser toute l’entreprise pour obtenir une meilleure satisfaction du client au moindre coût. Elle comprend la prévention des défauts (et non leur simple détection), la créativité dans le traitement des problèmes… c’est un levier important d’innovation sociale.
  • menant sa propre activité de Recherche et Développement. Elle dépense alors un pourcentage (plus ou moins important) de son chiffre d’affaires dans cette activité, généralement réalisée par des ingénieurs et des techniciens. Mais elle doit faire en sorte de retarder le moment où elle sera copiée. Pour se protéger contre les copies et les contrefaçons :

–> l’entreprise doit déposer un brevet. Il s’agit d’un titre de propriété industrielle, valable pendant vingt ans maximum, qui confère à son détenteur un monopole d’exploitation pendant cette période sur le territoire couvert par le titre. Plusieurs critères de brevetabilité doivent être réunis pour l’obtention d’un brevet : l’invention doit être technique, nouvelle et impliquer une activité inventive (c’est-à-dire ne pas découler de l’état de la technique) ; elle doit aussi être susceptible d’application industrielle. 

–> Une innovation peut également être protégée par le secret. Exemple : la formule du Coca-Cola. L’invention du départ est tombée dans le domaine public ; les ingrédients en sont connus. Mais la fabrication est un secret jalousement gardé. Les entreprises du monde entier fabriquent le coca sous licence. Elles reçoivent le concentré et se contentent d’y rajouter de l’eau et de l’embouteiller. 

L’entreprise peut aussi enrichir son patrimoine technologique en s’appuyant sur les innovations des autres entreprises (enrichissement en externe)

  • en obtenant une licence d’exploitation sur un brevet qu’une autre a déposé. La licence d’exploitation est un contrat par lequel le détenteur d’un brevet autorise un tiers à exploiter son brevet moyennant rémunération.
  • en rachetant des brevets appartenant à une entreprise existante pour obtenir la propriété industrielle des innovations déjà développées.
  • achetant une entreprise (développement par croissance externe) qui dispose de la technologie souhaitée: cette acquisition n’est pas nécessairement totale dans la mesure ou il peut être suffisant de détenir une part minoritaire du capital pour profiter de ses résultats.
  • en développant des partenariat technologiques : il s’agit pour une entreprise de mettre en commun temporairement des moyens avec d’autres entreprises mais aussi avec des organismes publics de recherche pour créer et/ou développer de nouvelles technologies. C’est dans cette logique qu’ont été développés, et soutenus financièrement par les pouvoirs publics, les pôles de compétitivité dans plusieurs régions de France.

L’acquisition de licences, de brevets ou d’une entreprise permettent un accès rapide aux technologies, donc à l’innovation. 

Les enjeux de la politique d’innovation 

L’intérêt de la politique d’innovation  

Quelles que soient ses modalités, la politique d’innovation présente plusieurs avantages pour une entreprise. Elle lui permet de : 

  • s’adapter aux évolutions de son environnement qu’elle a pu déceler grâce à la veille technologique.
  • s’assurer ou maintenir un avantage concurrentiel en termes de coûts ou de différenciation en confortant ses ressources intangibles. En effet, innover et déposer des brevets crée des barrières technologiques à l’entrée qui éloigne les concurrents, autorise des stratégies de différenciation ou une baisse des coûts, conforte l’image de marque, ce qui dans tout les cas permet d’attirer la clientèle et de faire des profits. 

Les difficultés liées à la politique d’innovation

La politique d’innovation subit un certain nombre de contraintes et présente donc des difficultés, qui sont de deux ordres : 

difficultés d’ordre financier :

  • coût élevé de la recherche menée en interne ou en partenariat (même si le partenariat permet de réduire l’apport personnel de chaque entreprise et de mobiliser des sommes plus importantes que celles qui pourraient l’être par une seule entreprise).
  • coût élevé de la protection par le brevet
  • retour incertain sur investissement dans la mesure ou la recherche est risquée et peut aboutir à une impasse. Cela conduit l’entreprise dans la mesure soit à abandonner les recherche en cours si elle s’en aperçoit à temps (ex. : le laboratoire IMERCK a interrompu ses recherches sur un médicament anti-obésité), soit à ne pas réussir à transformer son innovation en succès commercial. 

difficultés d’ordre organisationnel liées à la politique d’innovation :

L’efficacité de la politique d’innovation suppose en effet :

  • une culture d’entreprise favorable à l’innovation développée dans l’entreprise.
  • une structure plutôt flexible et transversale, sous la forme d’organisation innovatrice (adhocratie) ou d’organisation par projets, de manière à favoriser notamment la créativité des salariés.